QueenBaku, des femmes et des cordes.
Le 28 janvier 2017 a eu lieu “QueenBaku” au bar la Meduze à Lyon. Une très belle soirée de performances artistiques et de shibari (ou plutôt de kinbaku). Des attacheurs de talents, de la technique et de l’émotion. Trois duos très différents les uns des autres, des femmes qui attachent, et ce qu’on voit trop rarement, des femmes qui attachent des hommes. Mais surtout trois attacheurs dont je vous invite à faire plus ample connaissance.
Misungui était la première à entrer en scène. Cette jeune femme de 28 ans se qualifie elle-même de gender-queer et anarcho-féministe. Je ne lui ferai pas honneur en parlant d’elle. Si vous ne la connaissez pas, je vous laisse visiter son Tumblr, et lire cet article qui vous en apprendra plus sur ce “personnage” incroyablement intéressant et inspirant.
Attacheuse et modèle ont performé nus. Beauté des corps, elle maquillée de façon tribale, son partenaire, Pierretleloup, arrivé sur scène déjà en partie harnaché. La suspension qui a suivi n’était pas en elle même très impressionnante, le plus intéressant se passait entre Misungui et son modèle. Dans ses attentions, ses caresses, ses sourires. Lorsqu’elle a fait couler de la cire sur son partenaire, le sadisme se mêlait à la tendresse. Et les gémissements de Pierre se calquait peu à peu sur le rythme de la musique. Douleur, sensualité, primalité …
Pour avoir ensuite parlé avec Pierreetleloup, ni la douleur ni le plaisir n’était feins. Et du coup c’est ce plaisir, palpable, quasi animal que nous avons pu ressentir ce soir là.
Seul attacheur masculin ce soir là, Michael Ronsky nous proposait une autre sorte de spectacle. Nous connaissions Michael pour l’avoir déjà vu sur scène avec Mi-Do à Genève à la Gravière en 2015. Nous avions aimé la complicité qu’il avait avec sa modèle, également partenaire de vie.
Michael est avant tout un artiste. Compositeur des morceaux qui accompagnent ses performances, il construit un univers sur scène. Et comme avec Misungui, dans cette construction artistique les cordes étaient presque au second plan. Cagoulé (comme à son habitude) Mi-Do (belle, comme à son habitude) lui donnant la réplique, Michael a choisi ce soir là de jouer avec la matière, rependant sur sa “bunny” de l’eau et du sable.
Avec Isabelle Hanikamu on revenait sur un shibari plus traditionnel : Isabelle fait partie de ces rares kinbakushi ayant reçu l’enseignement d’un sensei japonais. Et de ceux, encore plus rares à qui le maître a donné le droit de pratiquer “en son nom”. Isabelle est l’élève de Naka Akira, dont elle dit répendre l’enseignement mais avec son propre style (“Je fais de l’Isabelle” a-t-elle précisé). Elle a donc une façon très traditionnelle d’attacher (en rangeant soigneusement ses noeuds par exemple), avec une expression physique et des “râles” de ponctuations proches des arts martiaux.
Sa performance avait les caractéristiques des spectacles de Shibari japonais où la modèle exprime la douleur jusqu’à la surjouer (comme dans cette vidéo). La technique est irréprochable, le corps de Stella Spei (la modèle d’Isabelle ce soir là) était suspendue et ouvert, pour permettre à Isabelle d’exprimer tout le sadisme possible avec de la cire, son fouet, et même ses dents.
Et puis, cerise sur le gâteau, Pierre Estable était dans la salle en tant que dessinateur officiel de l’événement. Ne le connaissant pas j’étais perplexe, n’ayant aucune idée de ce que l’artiste pouvait capter de ce qui se passait sur scène. J’ai finalement été très agréablement surpris et même impressionné en découvrant le résultat : Pierre a su capter le moment avec une pertinence et une justesse rare.
Au delà de vous avoir donné envie de ne pas rater la prochaine édition de Queenbaku j’espère surtout vous avoir permis de découvrir ces quatre artistes.
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